le royaume du BHOUTAN

 

 

Le Bhoutan a longtemps été un pays inconnu de l'Occident et mystérieux.  

Le pays avait réussi à échapper à la grande vague colonialiste du 19ème siècle et préservait farouchement son indépendance en pratiquant une politique d'isolation vis-à-vis de l'Occident. 

Mais cette volonté ne fut pas la seule raison qui contribua à préserver le Bhoutan. Il faut se tourner vers la géographie.

094_Jichudraka_Lingshi.jpg (80979 octets)Le Bhoutan aujourd'hui peuplé par 650.000 habitants, a une superficie de 47.000 kms2, à peu près la taille de la Suisse, et est situé à la latitude du Maroc. A peine 150 kms séparent la frontière sud avec l'Inde de la frontière nord avec le Tibet (Chine) et sur cette courte distance, l'altitude passe de 300 m à 7300 m. Le Bhoutan est donc un gigantesque escalier qui s'élève à partir de la moiteur des plaines de l'Assam et du Bengale en Inde pour atteindre l'air raréfié du grand Himalaya qui le sépare du plateau tibétain. Au sud des jungles impénétrables, au Nord, une barrière de montagnes, Le Bhoutan était donc naturellement Thimphu_vallee.jpg (53698 octets) protégé des agressions extérieures. Toutefois, aussi étrange que cela puisse paraître, il était plus facile d'accéder au Bhoutan par le nord que par le sud. Des cols perçaient la barrière himalayenne et les échanges pouvaient se faire de mai à octobre par des sentiers qui menaient en deux jours dans les vallées centrales. En revanche, entrer par le sud nécessitait plusieurs jours de marches dans des forêts tropicales inhospitalières et chaudes. Si historiquement, les échanges commerciaux ont existé avec le sud, c'est le Tibet qui a eu le plus de relations culturelles, religieuses et économiques avec le Bhoutan. Situé à la frontière entre deux mondes, le Bhoutan put au cours des siècles développer une culture tout à fait unique qui en fait encore de nos jours l'un des pays les plus attachants et les plus originaux du monde.

Le sud : Une zone de plaine de quelques kilomètres de largeurs forme la frontière avec l'Inde. Rapidement l'altitude s'élève jusqu'à 2000 m et cette région est couverte de forêts semi-tropicales épaisses. C'est le royaume des orchidées.

Le climat est chaud avec véritablement cinq saisons, ne se rafraîchissant qu' en hiver qui dure de novembre à février. Le printemps et l'automne sont courts avec des températures autour de 25°. L'été d'avril à juin est très sec et chaud, les températures montant jusqu'à 40°. La mousson est abondante de mi-juin à fin septembre et marcher dans ces régions devient alors particulièrement pénible à cause des sangsues.

La majorité des habitants du sud, appelés Lhotshampa "les gens des frontières du sud", sont d'origine népalaise, un terme qui recouvre différentes populations d'origine ethnique différente: les Sherpa, Tamang, Grung ou Limbu sont des tibéto-birmans tandis que les Bahuns et Chetris sont des indo-népalais. Tous, même s'ils avaient des langues différentes à l'origine, parlent le Népalais, une langue de la famille indo-européenne, qui est devenue la langue du petit commerce. La majeure partie d'entre eux est de religion hindoue mais les Sherpa et une partie des Tamang sont bouddhistes. Agriculteurs expérimentés, les Népalais ont beaucoup contribué à la mise en valeur du sud et font pousser du riz, de la cardamome et des oranges.  

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040_Wangdi_dzong.jpg (96524 octets)La zone centrale : Cette zone qui couvre une altitude de 2000m à 3500m de l'ouest à l'est du pays, avec quelques exceptions de vallées plus basses, constitue le coeur historique et culturel du Bhoutan. Le climat y est de type alpin avec mousson mais dans certaines vallées de l'est plus basses, il est de type semi-tropical avec mousson. Les saisons sont bien marquées: de novembre à mars, l'hiver peut être rigoureux avec des températures tombant la nuit sous zéro et quelques chutes de neige; le printemps et l'automne, les saisons les plus agréables, sont doux, mais le mois de juin juste avant la mousson peut être orageux et chaud. De fin juin à fin septembre, la mousson et son cortège de nuages bas envahit toutes les vallées et transforme le pays en un océan de verdure tandis qu'avril et mai voient la floraison de milliers de rhododendrons d'espèces différentes .

Cette zone se divise en trois régions distinctes, ayant chacune leurs spécificités bien que le processus de développement et les moyens de communication modernes aient maintenant un rôle certain d'homogénéisation.

Paro_Pont.jpg (77967 octets)    L'ouest: Cette région comprend cinq vallées: Ha, Paro, Thimphu, Punakha et Wangduephodrang. Elle est traditionnellement peuplée par les "Ngalong", " les Premiers Levés" qui parlent le dzongkha " la langue des forteresses", une langue apparentée au tibétain, qui est la langue nationale du Bhoutan.

Ha est la vallée qui a l'altitude la plus élevée (3000m et au-dessus); le riz ne peut pas y pousser, et les cultures sont essentiellement le blé d'hiver et l'orge, auxquels s'ajoute maintenant la pomme de terre. Les gens de Ha possèdent des troupeaux de yak qu'ils emmènent en transhumance vers le sud l'hiver. Paro et Thimphu situées entre 2200 et 2400m sont vouées à la culture du riz en champs inondés et aux vergers de pommiers, pêchers et pruniers. Thimphu est devenue la capitale du Bhoutan dans les années 50 et sa population a doublé en 20 ans atteignant aujourd'hui 35.000 habitants. Les habitations prennent donc peu à peu le pas sur les terres arables et le prix des champs s'envole.

Un col à 3000m conduit aux deux vallées jumelles, beaucoup plus basses

(1300m), de Punakha et Wangduephodrang. Ces deux vallées se consacrent essentiellement à la culture du riz ainsi qu'aux cultures maraîchères. Punakha, l'ancienne capitale, est encore la capitale hivernale du clergé d'état qui, depuis Thimphu, vient passer les six mois les plus froids dans une vallée au le climat si doux que bananiers et figuiers y poussent.

406_Tongsa_dzong.jpg (131203 octets)    Le Bhoutan central:  Une longue montée à travers une forêt de feuillus et de rhododendrons conduit de Wangduephodrang au col de Pelela (3300m) qui traverse les Montagnes noires. Celles-ci forment la frontière naturelle entre l'ouest et le centre du Bhoutan qui comprend les régions de Tongsa, Bumthang, Shemgang et Lhuntsi. La population de ces vallées parle une langue que les linguistes classent parmi les langues tibéto-birmanes influencées par le tibétain et qui se divise en différents dialectes selon les régions.

Tandis que Tongsa et Lhuntsi sont essentiellement agricoles et vouées à la culture du riz, les quatre vallées qui composent Bumthang sont situées à une altitude de 2700m et au-delà et le riz ne peut y pousser. Les pentes des montagnes couvertes de forêts de conifères et le sarrasin, l'orge, le blé et les pommes de terre sont les cultures principales, mais l'élevage de moutons pour la laine, de bovins et de yaks y est une source importante de revenus. La transhumance est largement pratiquée en hiver pour les troupeaux de bovins et de moutons, en particulier vers la région méridionale adjacente de Shemgang, basse et semi-tropicale, où la forêt et son sous-bois leur fournit la nourriture nécessaire. Shemgang est aussi le domaine d'orchidées extraordinaires.

Tongsa s'enorgueillit d'avoir le plus beau dzong du Bhoutan situé stratégiquement dans une gorge entre l'ouest et l'est du pays. Ses gouverneurs (Penlops) étaient très puissants et c'est l'un d'eux, Jigme Namgyel, qui prit le contrôle du pays au milieu du 19ème siècle, permettant ainsi plus tard à son fils Ugyen Wangchuck de devenir le premier roi du Bhoutan en 1907. Depuis, le prince héritier porte le titre de Tongsa Penlop, " Gouverneur de Tongsa".

027_Bumthang_villageoise.jpg (108700 octets)La région de Bumthang est le coeur géographique du pays . Elle est formée de quatre vallées aux pentes couvertes d'épaisses forêts de conifères et parsemées de petits temples d'une grande importance historique. Chume et Choekhor sont agricoles, tournées vers la culture du sarrasin qui formait jusqu'à récemment la base de l'alimentation. Tang et Ura, plus élevées, étaient essentiellement consacrées à l'élevage du mouton et du yak, mais dans les vingt dernières années la culture de la pomme de terre a transformé l'économie de Ura, enrichissant ses habitants de façon spectaculaire.

Les tissus de laine exécutés par les femmes de la région sont très prisés à travers tout le pays et contribuent de façon significative au revenu des familles.

A l'est de Bumthang, la région de Lhuntsi, autrefois appelée Kurtoe, produit un riz très apprécié et les femmes y tissent les plus beaux textiles du pays. Ces tissus qui peuvent prendre jusqu'à un an de travail, sont couverts de motifs géométriques qui ressemblent à de la broderie mais qui en fait n'en sont pas et relèvent plus de la technique du brocart; ils sont obtenus en ajoutant des fils de trame de couleur vive au fond du tissu ( cf. article sur l'art et l'artisanat).

Aujourd'hui la production d'huiles essentielles de façon semi-artisanale, et en particulier de térébenthine et de citronnelle, contribue de façon substantielle à l'économie rurale.

La position de Lhuntsi est tout à fait particulière. La partie supérieure de la vallée est étroitement associée à Bumthang du point de vue linguistique, historique et économique tandis que sa position géographique et sa partie inférieure la classent dans la partie orientale du pays. C'est donc un trait d'union entre ces deux parties du Bhoutan.

    L'Est: De Bumthang à la partie orientale du pays, le contraste est saisissant, surtout en hiver. En 70 kms de route, on passe d'une altitude de 4000m à 700m, d'un paysage enneigé à la moiteur tropicale.

150_Tashigang_tissage.jpg (159564 octets)La région orientale est aujourd'hui formée par les districts de Lhuntsi (cf. ci-dessus), Mongar, Tashiyangtse, Tashigang et Pemagatshel. Généralement d'altitude plus basse que le reste de la bande centrale, le climat y est plus chaud et la mousson forte. C'est aussi la région la plus peuplée du pays et la moins boisée. Les cultures les plus importantes sont le riz et surtout le maïs qui formait la base de l'alimentation. Le millet est aussi cultivé; il est la céréale de base pour la fabrication de l'alcool qui joue un rôle prépondérant dans la vie sociale de toute la région. Les troupeaux  de bovins y sont importants, et l'animal le plus prisé est le mithun, un bovin aux cornes impressionnantes et excellent reproducteur, que l'on retrouve également en Arunachal Pradesh, la province indienne qui jouxte l'est du Bhoutan. En revanche le yak est pratiquement inexistant sauf dans les vallées de Merak et Sakteng situées à plus de 3000m et qui constituent une poche culturelle et économique à part.

086_femmes_de_l_Est.jpg (77492 octets)La population de l'Est, les Sharchopas "Gens de l'est", sauf quelques exceptions comme les vallées de Merak et Sakteng, une partie du district de Tashiyangtse et quelques villages isolés du district de Mongar, parle le Tsangla, communément appelé Sharchopkha "langue des gens de l'est". Cette langue qui connaît des différences dialectales selon les endroits, est une langue tibéto-birmane, sans lien avec le tibétain ou le dzongkha, et elle n'est pas encore classée de façon définitive. Toutefois, les termes religieux viennent du tibétain.

La géographie de cette région se démarque aussi du reste du pays. Excepté quelques vallées comme Radi et Tashiyangtse, le paysage se caractérise par des gorges au fond desquelles coulent les rivières tandis que les habitations dispersées en groupes de deux ou trois et les champs sont situés vers le haut des montagnes ou des collines dont le sommet forme souvent un plateau. Depuis le début des années 80, les services administratifs (école, dispensaire, services agricole et vétérinaire, poste) ont donc souvent été placés dans un endroit qui permet de desservir le plus grand nombre d'habitations possible, créant ainsi un village auquel se sont ajoutés deux ou trois boutiques vendant des objets de première nécessité.

Le petit commerce avec les régions de l'Assam et de l'Arunachal Pradesh en Inde est actif depuis des siècles, apportant un supplément de revenus aux paysans qui le pratiquaient l'hiver. Quant aux femmes, elles tissent des tissus en coton ou soie épaisse avec des motifs géométriques en fils de chaîne ajoutés.

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Le Nord: Cette région est limitée au nord par les sommets du Grand Himalaya, culminant entre 6800 et 7400m, qui forment la frontière avec le Tibet. toutefois, cette frontière n'est pas infranchissable et elle est percée de plusieurs cols qui, depuis au moins le 7ème siècle, ont servi de voies de communications entre le Tibet et le Bhoutan.

096_Jomolhari_mont.jpg (41629 octets)267_primevere.jpg (57402 octets)Cette partie du Bhoutan s'étend de l'ouest à l'est et commence aux alentours de 3000m. Elle est habitée jusqu'à 5000m l'été. Le climat y est dur avec un hiver très froid et enneigé, et un été assez chaud et pluvieux. Cette configuration climatologique en fait une véritable réserve de plantes et fleurs rares et aujourd'hui protégées comme le bambou nain, le pavot bleu qui est la fleur nationale, l'edelweiss, la gentiane. Certaines plantes sont depuis des siècles utilisées pour la pharmacopée traditionnelle et étaient exportées vers le Tibet.

Peu peuplée, elle est habitée par des éleveurs semi-nomades qui parlent des dialectes du dzongkha ou du tibétain. Ils habitent des maisons qui servent aussi de réserves, avec un petit lopin pour la culture des raves ou d'orge. L'hiver, ils emmènent les yaks pâturer sur les pentes avoisinantes. Au printemps, une partie de la famille part bien au-delà de la limite des arbres, vers les hautes altitudes, et plante sa tente en poils de yak noirs au centre de pâturages où les yaks trouveront une nourriture abondante qui les consolera des rigueurs alimentaires de l'hiver. Le yak est l'animal providentiel et indispensable de cette région. Il fournit la viande, le beurre, le fromage, le yaourt; ses poils sont utilisés pour tisser les tentes et les vêtements; sa bouse sert de combustible; et sa viande sera échangée en automne dans les vallées centrales contre du riz, du sel et des outils de première nécessité.

Le commerce avec le Tibet qui était fort actif et formait un appoint de revenus pour ces éleveurs s'est arrêté depuis la fermeture de la frontière en 1959 à la suite de l'invasion chinoise. Toutefois, il semble avoir quelque peu repris de façon non-officielle dans les dernières années.

Mode de vie

091_Jangothang_caravane_yaks.jpg (134095 octets)L'économie du Bhoutan, si elle était fondée sur l'agriculture et l'élevage, était aussi très dépendante du commerce de proche en proche qui fonctionnait par le troc. Depuis les années 70, les échanges sont devenus de plus en plus monétarisés mais le troc se pratique encore dans des endroits reculés. Toutefois, il faut noter qu'il n'existait traditionnellement pas de classe commerçante; c'était certains paysans et les éleveurs eux-mêmes qui pratiquaient le commerce aux saisons qui le leur permettaient, c'est-à-dire en hiver avec l'Inde et au printemps et à l'automne, après la moisson avec le Tibet. Le système social de la vie en famille élargie permettait aussi l'absence d'un homme hors de la maison pendant plusieurs semaines.

288_Laya_villageoise.jpg (35641 octets)En effet, à la campagne, on vit en famille élargie tandis que dans les villes, la tendance est à la famille nucléaire. Le Bhoutan est un pays au système matrimonial et familial très tolérant. Le mariage peut prendre des formes diverses: monogamie, polygamie (avec des soeurs), polyandrie (avec des frères) dans le nord et à Merak et Sakteng. Le mariage n'est pas un sacrement et le divorce a toujours existé, probablement rendu plus aisé par le fait qu'il n'y a pas de système de dot, que les femmes héritent au même titre que les hommes et gardent leurs biens et leur nom après le mariage. D'autre part, un garçon ou une fille étaient aussi bien accueillis à la naissance, et souvent on préfère les filles car elles ont la réputation de mieux s'occuper de leurs parents quand ils sont vieux. L'indépendance et la force de caractère des femmes bhoutanaises sont certainement une des caractéristiques les plus intéressantes de cette société.

053_Thimphu_moines_.jpg (59784 octets)S'il y avait plusieurs fils, l'un d'eux partait au monastère autant par dévotion religieuse des parents que pour satisfaire la taxe monastique, aujourd'hui abolie. En outre, jusque dans les années 60, le monastère était le seul endroit où un enfant pouvait recevoir une éducation. Toutefois, le système était souple et si à l'âge adulte, un homme s'apercevait que la vie monastique ne lui convenait pas, il pouvait rendre ses voeux et sortir du monastère pour reprendre une vie laïque sans que la société ne réprouve son geste.

203_femmes_riziere.jpg (129882 octets)Tous les paysans du Bhoutan, sauf dans le nord, possèdent quelques poules, souvent des cochons noirs dont la chair est très appréciée - dans le sud des chèvres-, et un lopin de terre consacré à la culture de quelques légumes et en particulier des piments, qui est un légume à part entière et rend la cuisine bhoutanaise très relevée. L'utilisation du riz comme aliment de base se généralise à travers tout le pays et un Bhoutanais peut en manger jusqu'à 1kg par jour! Le riz est accompagné de ragoûts de légumes et de viandes, fraîches ou séchées, cuisinés avec une sauce très épicée. Le plat national est l'emadatsi, une sauce à base de fromage fondu dans laquelle ont cuit des piments. Les Bhoutanais sont traditionnellement peu friands de sucreries et les fruits sont mangés hors des repas. Le repas se clôt souvent par la mastication du doma, une chique de bétel, de chaux et de noix d'arec qui a des propriétés digestives et euphorisantes.

045_repas_traditionnel.jpg (102475 octets)On boit généralement entre les repas ou avant le repas mais peu pendant le repas. Les boissons sont le thé salé avec plus ou moins de beurre selon les régions, le thé au lait sucré à l'indienne, et récemment parmi les classes aisées, le thé chinois, noir ou au jasmin. La consommation d'alcool est traditionnellement très importante aussi bien chez les hommes que chez les femmes. Il s'agit soit d'une sorte de bière faite à partir de céréales (orge, blé, millet, maïs) fermentées quelques jours ou d'ara, un alcool de céréales distillé.

Les Bhoutanais sont des bons vivants qui ont un sens de l'humour aiguisé et paillard. Le tir à l'arc est à la fois le sport, le passe-temps et l'activité sociale par excellence des hommes et les joutes s'accompagnent de nombreuses libations. Toutefois, si les femmes ne tirent pas à l'arc, elles participent aux compétitions entre villages ou équipes en dansant et chantant pour encourager leur équipe. Et elles ne se privent pas de se moquer des hommes de l'équipe adverse en les attaquant verbalement de façon crue et acérée afin de les déstabiliser.  

112_Thimphu_tsechu_danseurs.jpg (51084 octets)125_Paro_tsechu_assistmoines.jpg (96221 octets)Les grandes fêtes religieuses sont l'occasion  pour toute une région de se retrouver et de renouveler sa foi en regardant les danses sacrées qui sont symboliques mais aussi didactiques. Les clowns font rire la foule par leurs pitreries souvent obscènes. Sacré et obscène coexistent toujours au Bhoutan. Ces fêtes sont aussi une occasion sociale où les villageois revêtent leurs plus beaux atours et bijoux, où les gens échangent des nouvelles et où les jeunes se rencontrent et flirtent sous le regard compréhensif des parents.

Une fête annuelle a aussi lieu dans chaque maison, en général l'hiver quand il n'y a pas de gros travaux agricoles, et elle rassemble famille et amis proches. Elle consiste en un rituel qui s'accompagne de lecture de textes. Exécuté par des religieux, il apporte des bénédictions et une protection pour la famille, les champs et le bétail. Chaque maison possède une pièce qui est une chapelle et qui sert aussi de lieu de réception pour les invités que l'on veut honorer.

Travaux des champs et rituels divers ont scandé la vie des Bhoutanais pendant des siècles. Depuis 30 ans des transformations socio-économiques importantes ont quelque peu bouleversé cette façon de vivre séculaire.

Le Bhoutan aujourd'hui

Comment décrire aujourd'hui le Bhoutan aujourd'hui en évitant les clichés faciles qui le comparent toujours  à une sorte d'Eden himalayen ? Le Bhoutan est un pays si surprenant qu'il n'entre dans aucune catégorie bien établie.

342_Thimphu_camion.jpg (92285 octets)Il y a quarante ans, c'était un pays fermé, pratiquant un isolationnisme voulu, encore médiéval dans ses structures et sans moyens de communications modernes. Aujourd'hui avec ses 600,000 habitants sur une superficie équivalente à celle de la Suisse et ses 540 US dollars de PNB qui est le plus élevé en Asie du Sud, c'est une nation ancrée dans le monde, membre de l'ONU et d'autres organisations internationales, entretenant des relations diplomatiques avec bon nombre de pays.

233_Thimphu_ceremonie_off.jpg (85306 octets)Monarchie depuis 1907, le pays dispose d'un gouvernement composé de plusieurs ministres et d'une assemblée nationale de 150 membres ainsi que d'assemblées villageoises (1981) et de districts (1991). Ce sont des forums où les Bhoutanais font part de leurs propositions et où sont expliquées les décisions gouvernementales. Le Roi, Jigme Singye Wangchuck, eut en 1987 cette formule: "Je suis plus intéressé par le Bonheur National Brut que par le Produit National Brut".

164_Punakha_moisson.jpg (153962 octets)La population vit encore à 80% de l'agriculture et de l'élevage. Le gouvernement emploie des fonctionnaires (environ 10.000) pour ses services administratifs ainsi que dans les domaines de l'éducation et de la santé qui sont gratuites et étatiques. Le secteur privé se développe depuis le début des années 1990 et les industries rapportent au gouvernement l'essentiel de ses ressources : agro-industries, cimenteries, carbide de calcium mais surtout centrales hydro-électriques qui exploitent seulement 10% du potentiel réel de 30.000 MW. L'électricité est exportée à 85% en Inde.

Le tourisme et ses revenus ne forme qu'une activité annexe pour le Bhoutan. Privatisé au début des années 1990, ce secteur est néanmoins étroitement contrôlé par le Tourism Authority of Bhutan (TAB) qui est le bras du gouvernement. Seuls les groupes sont autorisés et le forfait par jour est assez élevé. En 2000, 7000 touristes ont visité le Bhoutan.

295_gorges_vers_Laya.jpg (62433 octets)Avec l'eau, la forêt est la richesse du Bhoutan. Essences tropicales, feuillus des régions tempérées ou conifères couvrent 72°/° du territoire ( 64°/° vers 1960). Dans ce secteur aussi, la politique gouvernementale est celle de la préservation et non de l'exploitation car les Bhoutanais sont conscients des ravages écologiques et économiques que provoque une exploitation forcené de l'or vert.

Ce souci de la protection de l'environnement en général se traduit au niveau gouvernemental par l'existence d'une Commission pour l'Environnement (NEC) qui formule les orientations et veille à l'application des décisions. Les parcs nationaux couvrent 26°/° du territoire et y vivent de nombreuses espèces protégées que ce soit du monde animal (daim porte-musc, mouton bleu, takin, léopard des neiges, grue à col noir) ou végétal (pavot bleu, rhododendron, gentiane, orchidées, plantes médicinales). Soutenu activement par le Fond Mondial pour la Vie sauvage (WWF), le Bhoutan veut être aujourd'hui un pays leader dans ce domaine.

Le Bhoutan entre aujourd'hui dans son huitième Plan quinquennal de développement et s'il a des ressources propres, elles sont actuellement insuffisantes pour financer les grands projets tels que les routes et les télécommunications, ainsi que les constructions d'hôpitaux et d'écoles,  quatre objectifs prioritaires. Il y a quarante ans, il n'y avait pas de routes, pas de téléphone, pas d'électricité, trois écoles primaires et deux petits hôpitaux. Aujourd'hui, les routes, l'électricité,  le téléphone, le fax 266_Mongar_ecole_primaire.jpg (117230 octets) permettent de communiquer à l'intérieur du pays mais aussi à l'extérieur, même si ces services ne couvrent pas encore 100°/° de la population. Une compagnie aérienne, Druk Air,  dessert Delhi, Kathmandu, Calcutta, et Bangkok. 110.000 enfants sont scolarisés, une université a été créée et 660 structures médicales existent, que ce soient des vrais hôpitaux, des dispensaires ou des cliniques mobiles .

Ainsi, pour financer cette politique ambitieuse de développement, le Bhoutan fait-il appel à l'assistance financière et technique de plusieurs pays et organisations. L'Inde qui apporte sa contribution depuis 1961, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), l'UNICEF, l'OMS, le Japon, l'Union européenne, la Suisse, le Danemark, la Hollande et la Norvège sont  aujourd'hui les plus importants partenaires de coopération.

Ce développement, même mesuré et très contrôlé par la Commission du Plan, ne va pas sans les problèmes qui lui sont inhérents: urbanisation parfois sauvage et délinquance. Toutefois, à cause de sa population réduite, le Bhoutan a de bonnes chances de pouvoir contrôler ces problèmes. La capitale Thimphu ne compte que 50.000 habitants et n'a toujours pas de feux rouges. Cependant, le taux de natalité est trop rapide (2,5%) et le gouvernement encourage vivement le contrôle des naissances.

Deux autres problèmes, sans lien direct avec le développement, sont apparus ces dernières années. Le premier concerne plusieurs milliers de personnes d'origine népalaise qui vivent dans des camps au Népal et disent qu'elles ont été évincées de force du sud du Bhoutan entre 1990 et 1992. Le gouvernement bhoutanais dit que ces personnes soit sont parties de leur plein gré, soit ne sont pas citoyens bhoutanais. Les négociations entre les gouvernements népalais et bhoutanais pour résoudre cette situation n'ont pour l'instant pas abouti.

Le second problème ne concerne pas directement le Bhoutan qui s'y est trouvé impliqué par le jeu de la géographie. Les Bodos, une ethnie tibéto-birmane de la région de l'Assam (Inde) et qui vivent dans la région limitrophe du Bhoutan du sud-est, réclament depuis plusieurs années un état séparé. Cette agitation, dirigée contre l'Inde, est violente. Des groupes armés se cachent maintenant dans les jungles du Bhoutan et ont commencé des exactions au Bhoutan même. Cette situation inquiète beaucoup le gouvernement bhoutanais qui poursuit ces consultations avec l'Inde.

323_Tamshing_asistance.jpg (113593 octets)La prudence et la mesure qui caractérisent les orientations politiques bhoutanaises se retrouvent aussi dans la défense de la culture. Influencés depuis des siècles par la culture tibétaine qu'ils ont adaptée à leur pays et bouddhistes en majorité, les Bhoutanais sont fiers d'avoir une culture originale et revendiquent bien haut leur droit à la préserver. L'arrivée de la technologie permet l'informatisation de l'inventaires des biens culturels et religieux ainsi que du catalogue de la bibliothèque nationale. Un logiciel de dzongkha, la langue nationale, existe. L'Institut de médecine traditionnelle supervise un programme de culture et de traitement de plantes médicinales. Les arts sont enseignés dans des écoles spécialisées. Les maisons nouvellement construites doivent présenter des caractères architecturaux qui s'accorde avec le style du pays. Quant au bouddhisme du Grand Véhicule, Mahayana , qui est religion d'état, il joue un rôle prépondérant dans la formation du mode de pensée mais aussi dans la vie quotidienne. Les religieux exécutent des rituels plus ou moins complexes lors des cérémonies officielles mais aussi pour les familles qui font appel à eux en toute circonstance. L'école religieuse officielle est l'école drukpa kagyupa mais une grande partie du centre et de l'est du bhoutan est d'obédience nyingmapa. Les deux écoles adhèrent aux mêmes principes fondamentaux mais se distinguent par des rituels et des traditions d'enseignement quelque peu différents.

Le défi de vouloir l'équilibre entre développement et traditions caractérise aujourd'hui le Bhoutan. Mais le Bhoutan a depuis longtemps relevé un autre défi: celui de survivre et garder son identité entre deux géants, l'Inde et la Chine.

d'après un texte de Françoise Pommaret
2000

  • Note 1: La source des statistiques est la Planning Commission, Royal Government of Bhutan.

  • Note 2: la transcription des noms propres bhoutanais varient selon les publications. Nous avons essayé de suivre la plus courante.

  • pour en savoir plus :

  • http://amisdubhoutan.free.fr



14/10/2009
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